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Qualité de l’eau

Nutriments

Les nutriments sont indispensables à la vie, mais en fortes concentrations, ils sont un problème pour les lacs.

Les nutriments, notamment l’azote et le phosphore, sont naturellement présents dans tous les écosystèmes, ils sont indispensables à toute forme de vie et se retrouvent dans le lac Champlain par des processus naturels depuis des millénaires. Dans l’ère post-industrielle, les activités humaines ont toutefois rapidement accru les quantités d’azote et de phosphore déversées dans le lac Champlain et dans des milliers de plan d’eau partout dans le monde, avec de profondes répercussions sur la qualité de l’eau.

Pour chaque kilomètre carré de superficie du lac Champlain, il y a 18 kilomètres carrés de superficie de sols du bassin versant du lac Champlain qui déversent de l’eau vers le lac et chargée de sédiments, de nutriments et d’autres polluants potentiels. Pour les Grands Lacs, ce ratio est très inférieur : il n’y a que 1,5 à 3,4 fois plus de superficie de sols que de surface des lacs dans ces bassins. La majorité des nutriments proviennent de sources terrestres (Figure 5), c’est pourquoi le ratio de surface lac/bassin relativement élevé dans le cas du lac Champlain représente un défi important quant à la réduction de la pollution en nutriments.

Figure 5 | Charge annuelle de phosphore dans le lac Champlain en fonction de l’occupation des sols
Figure 5 | Charge annuelle de phosphore dans le lac Champlain en fonction de l’occupation des sols

Les rivières sont les voies d’acheminement de l’eau, des sédiments et des nutriments jusqu’au lac Champlain. Chaque année, les affluents du lac déversent environ 921 tonnes métriques (2 millions de livres) de phosphore. Les quantités annuelles de phosphore déversées dans le lac varient en fonction de la quantité de pluie et de ruissellement dans le bassin versant; cette variabilité liée aux précipitations et aux températures peut brouiller les efforts visant à réduire la charge de phosphore. Si les pratiques de gestion peuvent contribuer à réduire les intrants, les précipitations toujours plus intenses associées aux changements climatiques peuvent libérer plus de phosphore et potentiellement diminuer les effets positifs de certains progrès réalisés grâce aux efforts de réduction de la pollution.

La recherche a montré que les facteurs déterminants des concentrations annuels d’azote et de phosphore dans le lac sont différentes entre les sections profondes et peu profondes du lac Champlain. Dans les sections profondes, ces niveaux de nutriment sont déterminés par les apports des affluents en azote et en phosphore « dissous ». Sous cette forme, ils ne sont pas liés aux sédiments de plus grande taille et sont suffisamment petits pour être invisibles dans l’eau. Dans les sections peu profondes, les concentrations de nutriments sont le résultat de processus internes tels que les cycles biologiques de modification de la  forme d’azote et du relargage du phosphore résiduel  dans les sédiments au fond du lac et elles sont donc moins liées aux variations de la charge dans les cours d’eau d’une année à l’autre. À long terme, réduire la charge des affluents est le seul moyen de réduire les niveaux de nutriments dans le lac Champlain.

Le phosphore est l’un des principaux nutriments contribuant aux efflorescences de cyanobactéries.

La photosynthèse des plantes, les algues et les cyanobactéries nécessitent toutes un apport de carbone, d’azote, de phosphore et de lumière dans leur environnement pour leur croissance. Comme les autres nutriments existent généralement en abondance dans le lac Champlain, le phosphore est souvent la ressource qui limite la croissance des cyanobactéries. Pour réduire la fréquence et la persistance des efflorescences de cyanobactéries, les experts scientifiques et les gestionnaires ont fixé des limites ciblées pour les concentrations de phosphore pour chaque section du lac et travaillent à réduire l’apport de phosphore  qui provient des affluents.

De nombreux sections du lac présentent des concentrations en phosphore qui sont souvent proches ou inférieures aux objectifs ciblés. Toutefois, les concentrations en phosphore dans les baies peu profondes du lac Champlain sont souvent supérieures à ces objectifs.

L’excès de phosphore a un effet important sur l’écosystème du lac et constitue un facteur qui contribue aux efflorescences de cyanobactéries. Des objectifs de concentration en phosphore pour 13 sections du lac Champlain (Figure 6) ont été établies en 1991 et le LCBP a soutenu les programmes de survi des concentrations en phosphore dans le lac depuis 1990. De 1990 à 2020, la majorité de ces sections n’ont présenté aucune tendance à long terme concernant la concentration en phosphore, si ce n’est le bras Nord-Est, qui a présenté une tendance à la hausse durant cette période. Les concentrations annuelles moyennes étaient souvent proches ou en dessous des objectifs cibles depuis 1990 dans le lac principal, le segment Isle La Motte, la baie de Cumberland, Port Henry, le segment Lac Sud B, la baie de Malletts, la baie de Burlington et la baie de Shelburne, ce qui représentent environ 82 % du volume du lac Champlain.

Figure 6 | Concentration moyenne annuelle de phosphore par segment de lac
Figure 6 | Concentration moyenne annuelle de phosphore par segment de lac

Des concentrations en phosphore supérieures aux objectifs fixés ont été observées dans les eaux peu profondes des baies Missisquoi et de St. Albans, le segment Lac Sud A, ainsi que le segment plus profond du bras Nord-Est. Certains de ces secteurs ont des charges en phosphore élevées provenant de leurs bassins versants. En outre, les baies peu profondes sont plus sensibles aux problèmes associés aux excédents de phosphore que dans les baies plus profondes et du lac principal parce qu’il y a moins d’eau pour diluer les nutriments. Les baies peu profondes sont également plus touchées par le « phosphore résiduel » qui est libéré dans la colonne d’eau par les sédiments du fond du lac dans les situations de faible oxygénation.

La charge de phosphore dans le lac Champlain varie considérablement d’une année à l’autre et doit globalement être réduite pour atteindre les objectifs de qualité de l’eau.

La charge de phosphore reste un défi pour le lac Champlain et les tendances à long terme ne s’améliorent pas dans une majorité d’affluents. Bien que des diminutions de la charge à long terme aient été documentées dans les rivières Great Chazy, Salmon, Ausable, Little Ausable, LaPlatte et aux Brochets, des augmentations à long terme aussi de la charge de phosphore ont été documentées dans les ruisseaux Lewis, Otter et Little Otter et dans les rivières Missisquoi et Poultney. Aucun des autres affluents contrôlés ne présente cependant de tendances notables à long terme concernant la charge de phosphore.

Figure 7 | Charges de phosphore dans les segments du lac par rapport aux limites de TMDL
Figure 7 | Charges de phosphore dans les segments du lac par rapport aux limites de TMDL

En 2016, l’U.S. Environmental Protection Agency a publié une valeur révisée de la charge quotidienne maximale totale (TMDL) en phosphore pour 12 sections du lac Champlain relevant du Vermont, alors que l’État de New York a gardé pour l’objectif la TMDL établie en 2002 pour les sections du côté de New York du bassin versant. La charge de phosphore dans certaines sections du lac, comme la baie de Cumberland, est égale ou inférieure à ces objectifs; la charge de phosphore dans d’autres sections, comme la baie Missisquoi, est largement supérieure aux objectifs ciblés (Figure 7). Comme les nutriments et les sédiments sont principalement transportés vers le lac durant les périodes de crues, la charge de phosphore dépend fortement des variations annuelles d’enneigement, de précipitations et de périodes de sécheresse. Cette variabilité de la charge d’une année à l’autre va vraisemblablement se poursuivre et pourrait même augmenter sous l’effet du changement des régimes de précipitation lié aux changements climatiques. Cela signifie qu’une réduction de la charge annuelle moyenne de phosphore est essentielle à l’avenir de qualité de l’eau dans le lac Champlain.

De nombreux efforts sont en cours pour réduire la charge de phosphore et, à terme, réduire les concentrations en phosphore dans le lac Champlain.

Le lac Champlain a fait l’objet de nouveaux investissements dans la gestion du bassin versant par le gouvernement fédéral américain, des instances provinciales et des États, ainsi que des municipalités. De récents investissements dans des installations de traitement des eaux usées se sont traduits par d’importantes réductions de la charge de phosphore issue de ces sources dans les trois juridictions (Figure 8). En 2015, le parlement du Vermont a passé le Clean Water Act (Act 64, loi sur la qualité de l’eau), qui a établi plusieurs nouvelles règles ainsi que des sources de revenu pour le Vermont Clean Water Fund (fonds d’assainissement de l’eau), destiné à la réduction de la quantité de phosphore et autres formes de pollution entrant dans les cours d’eau de l’État. Le Vermont et le Québec ont passé un accord concernant la réduction du phosphore dans la baie Missisquoi en 2002. Cet accord réaffirmait l’objectif de concentration en phosphore fixée pour la baie et établissait un objectif de charge de phosphore provenant du bassin versant de la baie. Les deux juridictions ont récemment reconduit cet accord et les objectifs communs partagés en vue de la restauration de la baie Missisquoi.

Figure 8 | Charge de phosphore annuelle provenant des stations d’épuration des eaux usées par juridiction
Figure 8 | Charge de phosphore annuelle provenant des stations d’épuration des eaux usées par juridiction

Les agriculteurs, les agences de gestion des ressources et les organismes de bassin versant locaux reconnaissent depuis longtemps que les exploitations agricoles du bassin versant du lac Champlain jouent un rôle important dans les défis de réduction de la pollution par les nutriments. Plusieurs initiatives sont en cours pour aider le secteur agricole à atteindre les objectifs de charge de phosphore visées et, à terme, réduire les concentrations en phosphore dans le lac. Programmes de subventions, améliorations du traitement des eaux usées, assistance à la mise en œuvre de bonnes pratiques de gestion agricole et programmes de sensibilisation contribuent tous à réduire la charge de phosphore.

sediment plume at Missisquoi River delta
Panache de sédiments dans le delta de la rivière Missisquoi. Photo: LCBP

Les quantités relatives d’azote et de phosphore dans l’eau de lac peuvent influer sur les efflorescences de cyanobactéries et plusieurs facteurs sont en train de modifier l’équilibre entre ces nutriments dans le lac Champlain.

Bien que ce ne soit habituellement pas la principale cause de prolifération des cyanobactéries, l’azote est un autre nutriment essentiel exerçant une influence majeure sur les écosystèmes et sur la façon dont les efflorescences de cyanobactéries se produisent. De nombreuses espèces de cyanobactéries ont la remarquable capacité de capturer leur propre azote de l’atmosphère. Cela signifie que lorsque l’équilibre entre l’azote et le phosphore dans le lac penche vers une concentration d’azote relativement faible, les cyanobactéries peuvent parfois surpasser d’autres phytoplanctons présents dans l’eau et être plus susceptibles de produire des efflorescences.

On a observé une baisse de la concentration d’azote à l’échelle du lac depuis les débuts du programme de suivi en 1990, probablement liée à la baisse des apports d’azote par les émissions de combustibles fossiles suite à l’entrée en vigueur de l’U.S. Clean Air Act. Cette diminution contribue à l’évolution du rapport relatives d’azote et de phosphore dans le lac (Figure 9).

Figure 9 | Rapport azote : phosphore annuel moyen dans le lac Champlain
Figure 9 | Rapport azote : phosphore annuel moyen dans le lac Champlain
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Ce que vous pouvez faire

Analysez votre sol. Pour réduire le ruissellement de nutriments à partir de votre terrain, analysez le sol de la pelouse et du jardin pour déterminer les nutriments dont le sol a besoin pour faire pousser vos plantes avant d’utiliser un engrais. Il peut être possible d’utiliser moins d’engrais qu’on ne pense, voire pas du tout.

Favorisez la bonne santé du sol. Améliorez la santé du sol de vos pelouses et jardins plutôt que de vous en remettre à des produits d’entretien des pelouses qui importent des nutriments dans les cours d’eau. L’ajout de compost et une meilleure aération peuvent contribuer à créer un sol sain.

Relevez la lame. Réglez la hauteur de lame de votre tondeuse à 75 mm (3 po) et laissez l’herbe coupée sur la pelouse. Une herbe haute est plus saine et a des racines plus profondes qui retiennent mieux l’eau, ce qui réduit le ruissellement des eaux pluviales.

Réduisez le ruissellement. Il y a des moyens simples de réduire le ruissellement des eaux pluviales autour de la maison. Redirigez vos descentes de gouttière vers une pelouse, plantez un jardin de pluie ou installez une citerne pluviale.

Lavez votre voiture sur la pelouse. Lavez votre voiture sur une pelouse plutôt que dans une allée de garage afin d’éviter que les détergents s’écoulent vers les cours d’eau. Ou bien, allez au lave-auto, où l’eau est traitée après utilisation.

Créez des zones tampons naturelles. Protégez et replantez la végétation indigène, en particulier le long des rives et des berges pour maintenir le sol en place et réduire l’érosion.